jeudi, novembre 21, 2024
CommencerIdéauxEn RDC, la loi Tshiani et le poison de la politisation des identités...

En RDC, la loi Tshiani et le poison de la politisation des identités ethniques

Selon Noël Tshiani, candidat à la présidentielle 2018 en RDC, seuls les citoyens nés de père et de mère congolais sont partis pour accéder aux plus hautes fonctions de l'État – dont la présidence de la République. Préoccupé par le risque d’« infiltration » de « mercenaires » au sommet de l’État, ce patriote présumé ethniquement pur a présenté en juillet 2021 un projet de loi interdisant aux Congolais ethniquement impurs d’accéder au pouvoir. Cela a été rapidement rejeté.

Mais le contexte a évolué depuis : Moïse Katumbi, qui a eu la curieuse idée d'être né d'un père grec et l'audace de rompre avec la coalition pro-Tshisekedi en 2022, a fait pression sur son vice-président jusqu'à se présenter aux élections. à l’élection présidentielle de décembre 2023 pour votre parti. Désormais, le président de l'Assemblée nationale de la RDC, Christophe Mboso, est ouvert à l'analyse du projet de loi de Tshiani et pourrait l'inscrire à l'ordre du jour de la nouvelle session parlementaire. La politique est le nom que portent les idéalistes donné en guerre.

Les salauds de la République

La dimension grossièrement politique de ces manœuvres est inquiétante compte tenu des défis auxquels est confrontée la RDC. Cela pourrait justifier un consensus sur la nécessité absolue d’éviter les colères inutilement enflammées. Il est également juste de s’étonner de voir un homme politique importer un concept qui, dans d’autres pays, s’est révélé toxique, pour le greffer sur le fragile corps social de la RDC.

Il convient cependant de noter, pour se réjouir, la saine réaction de nombreuses institutions et autorités congolaises qui rejettent le projet de loi présenté par Noël Tshiani et dénoncent le danger qu'il représente pour un pays dont la cohésion nationale est déjà gravement mise à mal. Mais quel est exactement le problème de ce texte ?

S’il est approuvé, le projet de loi Tshiani consacrerait l’existence de deux catégories de citoyens congolais : les uns, chimiquement purs, dotés de droits « naturels », dont l’accès aux plus hautes fonctions du pays, et les autres, citoyens de seconde zone, une sorte de des salauds de la République dont l’identité ternie les rendrait suspects de déloyauté envers l’État congolais.

Aucun effort personnel, aucun mérite, aucun sacrifice ne suffirait à les libérer de leur condition, enfermés dans une sorte de maladie d'identité. Leur destin serait la soumission à un ordre identitaire immuable. Ainsi, dans l’esprit de l’ancien candidat à la présidentielle, les Congolais « autochtones », grands gagnants à la loterie de l’ADN, avaient une vocation naturelle à présider aux destinées des Congolais impurs.

Une telle ordonnance serait fondamentalement injuste. Cela plongerait les Congolais de seconde zone dans une insécurité structurelle. Si aujourd'hui on leur refusait l'accès à certaines fonctions, qu'est-ce qui empêcherait les quotas décidés par le gouvernement d'une ethnie congolaise de limiter l'accès de leurs enfants à certains examens publics ? , ou juste à l'école ? Si la perspective qu'un Congolais disqualifié accède aux plus hautes fonctions est effrayante, pourquoi serait-il moins inquiétant d'en avoir un à la tête d'un hôpital, où il (elle) ça pourrait toujours « infiltrer » « les leurs » et provoquer la mort de nombreux Congolais de catégorie 1 ?

Bref, cette insécurité institutionnalisée alimente le ressentiment, suscite la méfiance des citoyens et mine la confiance dans les institutions étatiques. Elle conduirait à l’émergence d’un imaginaire commun, d’une conscience de (sous)classe, d’une identité politique fondée sur le ressentiment et le désir de vengeance.

Des groupes irréconciliables

Le transfert politique qui s’ensuivrait se heurterait inévitablement au refus des élites indigènes congolaises d’y renoncer. Car cela équivaudrait à renoncer à des privilèges importants, même s’ils étaient indus. La peur d’une éventuelle rétrogradation, l’inquiétude de probables mesures de représailles contre une classe dirigeante détestée, ou tout simplement la perspective d’un avenir incertain seraient insupportables et empêcheraient toute remise en cause du système. La seule issue à ces contradictions serait finalement une confrontation entre deux groupes irréconciliables. Ce serait sans aucun doute violent. En effet, partout où l’identité ethnique a été politisée, la paix a reculé et la violence a prospéré. Une loi Tshiani serait une défaite majeure pour la stabilité en RDC.

Les relations entre le Rwanda et la RDC sont tellement dégradées qu’il est illusoire de s’attendre à ce que l’histoire ou l’expérience d’un pays soit considérée comme utile à l’autre. Il n'en est pas moins vrai que la voie que défend Noël Tshiani pour son pays évoque le suprémacisme hutu qui prévaut au Rwanda depuis l'indépendance du pays et jusqu'au génocide perpétré contre les Tutsis, le 29e anniversaire. La politisation des identités ethniques a impliqué les relations entre les citoyens rwandais, a divisé le pays et a conduit au massacre de près d'un million d'entre eux pour le seul crime d'être des Tutsis, c'est-à-dire des Rwandais de seconde zone.

La fameuse « balkanisation » tant dénoncée par la classe politique congolaise n’est pas seulement le résultat de processus extérieurs (invasion étrangère) ; C’est aussi le résultat de décisions politiques mal réfléchies, opportunistes et ignorantes. C'est le cas de ce projet de loi congolais qui, s'il était approuvé, conduirait de fait le pays à perte.

Yann Amoussou
Yann Amoussouhttps://afroapaixonados.com
Né au Bénin, Yann AMOUSSOU a apporté avec lui une grande richesse culturelle à son arrivée au Brésil en 2015. Diplômé en Relations Internationales de l'Université de Brasilia, il a fondé des entreprises telles que RoupasAfricanas.com et TecidosAfricanos.com, en plus de coordonner le volontariat projet « L'Afrique à l'école ». A 27 ans, Yann est passionné de panafricanisme et depuis tout petit il rêve de devenir président du Bénin. Sa quête constante d'approfondir la connaissance des cultures africaines l'a amené à créer la chaîne d'information AfroApaixonados.
ARTICLES LIÉS

LAISSER UNE RÉPONSE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
Veuillez entrer votre nom ici

- Annonce du partenaire - Cliquez pour accéderspot_img

Plus populaire

test

test

Commentaires récents

Utilizamos cookies para lhe proporcionar a melhor experiência online. Ao concordar, você aceita o uso de cookies de acordo com nossa política de cookies.

Close Popup